Psychologie sociale, morceaux choisis - L'INFLUENCE DE LA CULTURE

Publié le par Sophie

lecture complémentaire : "Au delà de la culture" d'Edward T. Hall (génial !)

lecture complémentaire : "Au delà de la culture" d'Edward T. Hall (génial !)

Lors d'un cours très intéressant sur la communication et la culture, il nous a été demandé de répondre à la question suivante : "En quoi la culture influence t-elle notre manière de communiquer ?"

La plupart des anthropologues s'accordent pour définir la culture comme un système acquis formé de plusieurs éléments solidaires partagés par les individus d'un même groupe. Pour Edward T. Hall, l'homme communique au moyen de la culture, présente à tous les niveaux.
 

« Aucun aspect de la vie humaine n'échappe à son emprise, qu'il s'agisse de la personnalité, de la manière de s'exprimer, de penser, de bouger, de résoudre les problèmes, de la planification et du tracé des villes, de l'organisation et du fonctionnement du système de communication, ou des structures et du fonctionnement des systèmes économiques et gouvernementaux. »


Culture et communication sont donc étroitement liées l'une à l'autre. En fait, la culture est communication et la communication est culture !
 

La culture façonne l'homme tout entier, sa façon d'être, de vivre, de penser, de se comporter, de s'exprimer et donc évidemment de communiquer et de structurer ses relations avec autrui.


Le langage et par extension les diverses langues parlées à travers le monde, sont le reflet de la richesse et de la diversité des cultures et sociétés humaines. Elles naissent, vivent et se développent en fonction des besoins de la société et présentent des caractéristiques qui leur sont propres. Parmi ces caractéristiques figurent les signaux du paralangage qui accompagnent la parole et la communication corporelle.
 

Dans les cultures latines ou les pays africains, le langage du corps est très important alors que les cultures anglo-saxonnes, nordiques ou asiatiques par exemple prônent la retenue et inhibent leur gestuelle. Ces différences viennent des valeurs et principes qui leur ont été inculqués quant à ce qu'il convient de dire, de faire ou sur la manière de se comporter. Les travaux de Ray Birdwhistell sur la kinésique (décodage des gestes, 1952), d'Erving Goffman sur la présentation de soi (1959), ou encore ceux de Edward T. Hall en matière de proxémique (distance interpersonnelles et maîtrise de l'espace, 1963) ainsi que les études de William Condon autour de la synchronie (rythmes et coordination des mouvements, 60's) ont beaucoup apporté à la connaissance de l'homme en tant qu'être social et ont permis d'identifier de nombreuses différences d'ordre culturel.
 

Ainsi, de nombreux gestes « emblèmes » ont été définis par Efron (1941), Eckman et Friesen (1969) et Morris (1977) comme des signaux culturels codés que l'émetteur et le récepteur comprennent sur la base de références culturelles identiques. Selon les zones géographiques, les civilisations, ces gestes peuvent avoir une signification complètement différente. Pour exemple, on peut citer les travaux réalisés par Ekman en 1972 autour du geste-emblème du suicide. Il a ainsi pu montrer la part de culture dans ces gestes.
 

«  En occident, on appuie un ou deux doigts sur la tempe, on se met la main sur la gorge en Nouvelle-Guinée, et le poing dans l'estomac au Japon pour imiter le sepuku ou hara-kiri. Cela parce qu'on imite la forme typique et majoritaire de suicide. »2


En ce qui concerne l'expression des émotions, bien qu'il existe une certaine universalité dans le langage facial rendant les émotions de base, il n'en existe pas moins de nombreuses variantes en fonction de la culture (cf travaux d'Ekman et Friesen, 1966 à 1973).
 

Ajoutons à cela la mode, domaine futile et éphémère par excellence qui constitue le parfait exemple de l'influence de la culture sur la présentation de soi. La façon de s'habiller, se coiffer, se maquiller ou de recourir à divers accessoires corporels est une manière de communiquer de façon non verbale. Elle peut traduire la volonté de s'intégrer en se conformant à ce qui est « branché » (marques, couleurs, formes, tendances) ou, au contraire, développer un contre-courant anticonformiste pour exprimer le rejet de la société telle qu'elle est (mode gothique, tatouage, piercing...). Elle est différente selon les pays, la civilisation, la société, l'âge et la culture des individus et transmet un message propre dans chaque cas.
 

Autre exemple : la proxémique, mise en évidence par Edward T. Hall (à partir de 1963). Elle renseigne sur les distances interpersonnelles de rigueur dans les interactions (selon le degré d'intimité avec l'interlocuteur) mais également sur le rapport de l'être humain avec l'espace. Les « schémas internes d'espace » ainsi que les distances de rigueur entre interlocuteurs sont une série de codes que l'individu intègre lors de son apprentissage social. Ils dépendent de son environnement, son cadre de vie ainsi que du groupe culturel auquel il appartient.
 

En outre, pour compléter le tableau, il est bon d'évoquer William Condon et les travaux réalisés dans les années 1960 sur la notion de « synchronie ». Par une succession d'expériences, il est arrivé à la conclusion que les individus en interaction remuent ensemble dans une sorte de danse exécutée sans musique et sans orchestration consciente.
 

«Il ne rime à rien de se représenter les êtres humains comme des entités isolées, émettant des messages timides les uns envers les autres. Il serait plus fécond de considérer le lien qui se crée entre les hommes comme le résultat d'une participation au sein de formes d'organisation partagées. Les êtres humains sont unis les uns aux autres par une succession de rythmes spécifiques à une culture, et qui s'expriment à travers la langue ou les mouvements corporels. »3


Enfin, les différentes formes d'expression artistiques, la musique et la danse représentent également une manière de communiquer et ont donc leur place dans cette étude. Quelle que soit la discipline par laquelle l'artiste s'exprime, ses œuvres sont un reflet de ce qu'il ressent, de ce qu'il vit et de la façon dont il perçoit le monde et les autres. Profondément ancré dans son époque, son environnement, son univers social, sa créativité, son inspiration seront inévitablement influencées par ces éléments culturels qui le façonnent. Comme le suggère Edward T. Hall dans « Au-delà de la culture », la culture agit comme un écran sélectif commandant l'attention ou l'ignorance volontaire sur les informations qui vont constituer sa réalité. Geneviève Vinsonneau va même plus loin en affirmant que d'une culture à l'autre, à travers le même objet ou la même personne, on ne perçoit pas la même chose. Même les couleurs ne sont pas perçues de la même manière !
 

« Qu'il s'agisse de sensations visuelles, gustatives, olfactives, tactiles, sonores… la culture médiatise toujours ce qui est à percevoir, en désignant ce qui est agréable ou ne l'est pas, ce qui est beau ou ne l'est pas. »4


Or, il est évident que ce l'on ne perçoit pas de manière identique de par sa culture ne sera pas transmis aux autres de la même manière. Cette différence de perception culturelle change donc de manière certaine la façon de communiquer et surtout le contenu du message transmis.


De nos jours, tout doit aller plus vite, plus loin et la communication n'échappe pas à cette tendance. Les progrès techniques des procédés de communication suivent l'engouement de la société en ce sens, on constate la présence des téléphones mobiles, d'Internet, de la visio-conférence, des réseaux sociaux... dans presque tous les foyers. On peut envoyer des messages partout dans le monde, à n'importe quelle heure et à partir de n'importe où. Notre manière de communiquer a été inévitablement influencée par ces phénomènes culturels et les progrès techniques nous ont permis d'évoluer vers une nouvelle ère de communication : la communication numérique et virtuelle.


Pour conclure, l'influence de la culture sur la communication est inévitable et ne doit pas être considérée comme négative pour l'homme. Néanmoins, d'après Edward T. Hall, pour mieux communiquer, mieux comprendre les êtres humains quel que soit leur origine, il conviendrait de dépasser notre déterminisme culturel et voir « au-delà de la culture ».

 

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